Chevalier d'un jour

A hard days’s knight! (*) Entre les coursiers qui s’emballent et la cotte de maille qui pèse une tonne, jouer au guerrier médiéval n’est pas une partie de plaisir.

 

Par David Wigg – The Daily Mail (23 septembre 2011)

 

La pluie du petit matin s’est éloignée et les premiers rayons de soleil percent à travers la brume pour révéler les vertes pâtures et les forêts du Royaume de Camelot. Tout en haut sur les remparts, je suis habillé en noble chevalier, l’épée à la main et prêt pour la bataille. En fait je ne suis pas certain de de savoir qui aura ma peau en premier – nos ennemis ou bien le poids écrasant de l’armure et la chaleur étouffante qui se répand à l’intérieur.

Comme si ça ne suffisait pas, nos fidèles destriers – qui font claquer leurs sabots avec impatience en contrebas, alors qu’ils attendent d’entrer en action – ne me paraissent pas des plus amicaux non plus.

Je suis sur le plateau de Merlin, la série à succès de BBC One, alors qu’on est en train de tourner la 4ème saison dans le Nord de la France, où le cadre féérique et médiéval du Château de Pierrefonds – bâti au 14ème siècle et utilisé jadis comme résidence par Napoléon III – sert de décor à Camelot, la cour légendaire d’Arthur.

Avec une audience de plus de 7 millions de téléspectateurs au Royaume-Uni et une diffusion dans 208 pays à travers le monde, la série raconte les aventures du jeune sorcier Merlin, qui doit garder ses pouvoirs secrets car la magie est interdite.

Alors que je regardais ce qui se passait, je me suis fait enrôler pour devenir l’un des chevaliers d’Arthur. Heather Leat, la responsable des costumes tient le haut d’une cotte mail ouvert pendant que je me tortille avec précaution pour y faire passer ma tête.

« Attention » prévient-elle. « Le métal est très coupant et il faut faire attention de ne pas vous couper le visage – ou même pire encore, de vous trancher vous-même la gorge ce qui priverait les envahisseurs de ce plaisir. » Ensuite, j’ai enfilé une chemise grise, de lourds pantalons tenus par une épaisse ceinture, tellement serrée que ça m’a coupé le souffle. Une paire de bottes hautes complètent le costume.

Le seul problème est que tout ça est tellement lourd que dès que j’ai essayé de bouger, la sueur a commencé à dégouliner au risque de faire rouiller la cotte de maille. Perceval, mon collègue chevalier (joué par Tom Hopper) m’a dit qu’il connaissait bien ce genre de sensation. «Le côté positif c’est que ça remplace une bonne séance de muscu, surtout quand on doit escalader des tas de rochers, ce qu’on fait dans la série » me dit-il, « ça t’évite de devoir aller à la salle de sport ».

Leon (Rupert Young) un autre chevalier, espère qu’on ne va pas avoir de scène de tournoi. « Ces scènes sont difficiles parce qu’on doit porter une protection supplémentaire, qui est encore plus contraignante. »

Les chevaux nous regardent avec ce qu’on pourrait prendre pour de la méfiance et de l’appréhension. Toutefois, on m’assure qu’ils sont forts et supportent sans difficulté le poids du plus costaud des chevaliers. Ils raffolent des scènes d’action et, apparemment, adorent frimer devant les caméras.

J’ai finalement été soulagé d’apprendre que pour des raisons de sécurité je n’étais pas autorisé à monter à cheval, à la grande déception des autres chevaliers dont l’unique conseil jusque-là avait été : « Si tu te retrouves à glisser de ton cheval, tu n’as qu’à te cramponner à ses oreilles. »

Soudain, alors que la brume se lève, Camelot est prêt pour la bataille. Gaius, le médecin de la cour (interprété par Richard Wilson) a été kidnappé et les chevaliers du roi sont appelés à la rescousse. Ils font un bruit de tonnerre alors qu’ils passent le pont-levis à cheval, leurs capes rouges qui flottent contrastent de façon spectaculaire avec les murailles grises du château à l’arrière-plan.

Puis c’est la réalité du tournage qui ressurgit. Ils ne vont pas plus loin que la barrière lorsque le réalisateur, satisfait par cette courte prise, crie « Coupez ! ». Les chevaux connaissent l’exercice. Ils reviennent au petit galop vers le camp où on les récompense avec des morceaux de sucre et de l’eau, pendant que les chevaliers font la queue pour du thé fort et des sandwiches au bacon.

Un peu plus tard, je suis plein d’admiration lorsque je vois passer, Richard Wilson, 75 ans, en trottinant lui aussi. Là encore, la réalité menace de prendre le pas sur la magie. Tous les acteurs principaux sont doublés à chaque fois que les scènes sont considérées comme dangereuses, mais on m’assure que c’est bien Richard qui est là dans la robe flottante et sous la perruque grise. Il arrive par moment qu’il y ait 250 personnes sur le tournage.

Sara Hamill, la productrice, est responsable de la coordination. « C’est un endroit fabuleux, mais on doit caser beaucoup de choses quand on est ici car le temps est précieux. Par exemple, aujourd’hui on filme les chevaliers quittant le château au galop, pendant qu’une autre équipe tourne une scène dans la salle du trône. »

Les vedettes de la série me disent qu’elles doivent être prêtes à tout. Colin Morgan, l’acteur irlandais de 25 ans qui joue le rôle du jeune Merlin nous le confirme : « On m’a déjà demandé de faire des choses un peu extrêmes. Dans un épisode je devais me jeter dans l’eau glaciale d’un lac pour sauver Arthur. » Bradley James, le beau gosse de la série, qui interprète le Prince Arthur, semble monter à cheval comme un cavalier confirmé, mais ce n’est pas le cas et il a vécu quelques moments atroces.

« J’avais peur de ne pas obtenir le rôle parce que je ne savais pas monter à cheval avant ça. » Explique Bradley, 28 ans. « Un jour, on est arrivé sur le tournage et j’ai remarqué que l’un de chevaux avait vraiment l’air dingue. J’ai dit à Colin qui était à côté de moi, dans le rôle de Merlin mon serviteur, je ne voudrais pas être à la place du pauvre type qui va devoir monter ce cheval. A ma grande horreur, c’était moi !

A la première prise, le cheval s’est emballé et m’a embarqué au galop à toute vitesse dans les bois. J’ai fini pas juste penser à tenir et à sauver ma peau. Heureusement je suis resté en selle et ça s’est bien terminé. »

Morgane, la méchante sorcière et Némésis d’Arthur, jouée par Katie McGrath, 28 ans, a été bannie de Camelot pour avoir comploté contre le Prince Arthur. Elle confie : «C’est dommage parce que je n’ai pas beaucoup de scènes avec les garçons. Surtout cette année où on a tant de beaux chevaliers costauds ! »

Toujours dans cette saison, on voit l’apparition d’une nouvelle menace sous les traits d’Agravain, l’oncle retors d’Arthur, joué par Nathaniel Parker. « Il est plutôt terrifiant, mais bizarrement Arthur le trouve rassurant et fait de lui son bras droit. » explique Nathaniel Parker, 49 ans.

« Agravain est un ambitieux, et il ne veut pas seulement du trône de Camelot par esprit de vengeance mais aussi parce qu’il est persuadé d’être le roi légitime. » A la fin de la journée, je me suis extirpé de ma cotte de maille et j’ai eu l’impression d’être débarrassé d’un grand poids sur les épaules. Serais-je prêt à rejoindre le tournage pour un nouvel enrôlement le lendemain ? Non, pour moi, chevalier un jour c’est bien suffisant.

(*) jeu de mots  à partir d’une chanson des Beatles, Hard Day’s Night

 

Article original paru sur le site du Daily Mail.

Traduction Realbion pour Merlin-Hypnoweb